Comment la vie s’auto-organise

Ceci est la traduction d’un texte de Joanna Macy, qui a créé Le Travail qui Relie (The Work that Reconnects), un enseignement et un mouvement autour de notre re-connection au vivant.

~ Comment la vie s’auto-organise ~

La plus grand évolution de notre époque est la manière dont nous voyons le monde. Le paradigme mécaniste qui sous-tend la Société de Croissance Industrielle cède devant la prise de conscience que nous appartenons à un cosmos vivant qui s’organise lui-même.

La théorie générale des systèmes, qui a émergé des sciences de la vie, apporte des nouvelles preuves qui confirment les anciens savoirs indigènes: la terre est vivante, le mental est envahissant, tous les êtres nous sont reliés. Cette prise de conscience change tout. Elle change notre perception de qui nous sommes et de ce dont nous avons besoin, et la manière dont nous pouvons agir ensemble en confiance pour un avenir bon et noble.

Chaque système, de l’atome à la galaxie, est un tout. Cela signifie qu’il n’est pas réductible à ses composantes. Sa nature propre et ses capacités proviennent des relations interactives entre ses parts.

Ce jeu de relations est synergique; il génère des « propriétés émergentes » et des nouvelles possibilités, qui ne sont pas prévisibles depuis les caractéristiques de ses parties dissociées – de la même manière que l’humidité de l’eau ne peut être prédite depuis l’oxygène et l’hydrogène avant qu’ils se combinent, de la même manière que l’élasticité de l’acier va bien au delà des forces combinées du fer et du nickel.

Cette propriété des systèmes ouverts met au défi l’application universelle de la Deuxième Loi de la Thermodynamique, pierre angulaire de la science classique sur laquelle repose la notion d’entropie, l’usure de toute vie.

En dépit du flot continu de matière-énergie et d’information, et en fait grâce à ce flot continu, les système ouverts sont capables de maintenir leur équilibre; ils se stabilisent tout seuls. En vertu de cette capacité, les systèmes peuvent s’auto-réguler pour compenser des conditions extérieures changeantes.

Cette fonction homéostatique est remplie par l’enregistrement/la surveillance des effets de leur propre fonctionnement, les ajustant à leurs paramètres propres, comme un thermostat. C’est de cette manière que nous maintenons notre température corporelle, guérissons d’une coupure, ou faisons du vélo.

Les systèmes ouverts non seulement maintiennent leur équilibre en dépit du flux, mais de surcroit ils évoluent en complexité. Lorsque les défis que posent leur environnement se maintiennent, ils peuvent s’écrouler ou bien s’adapter en se re-organisant autour de nouvelles règles, plus réactives. C’est une autre fonction du feedback. C’est de cette façon que nous apprenons et que nous avons évolué depuis l’amibe.

Toutefois, si la modification de nos comportements n’est pas compatibles avec les défis auxquels nous faisons face, et que nous ne parvenons pas à atteindre un nouvel équilibre grâce à elle, la boucle de feedback positif perd les pédales et s’affole, menant au final à un effondrement des systèmes.

Chaque système est un « holon » – c’est à dire à la fois un ensemble cohérent, composé de sous-systèmes, et une partie d’un système plus large. Ainsi les holons forment des « hiérarchies en nid », des systèmes au sein d’autres systèmes, des circuits au sein d’autres circuits, des champs au sein d’autres champs. Chaque niveau holonique – disons de l’atome à la molécule, de la cellule à l’organe, de la personne à la famille – génère des propriétés émergentes qui ne sont pas réductibles aux capacités des composants séparés.

Bien loin des hiérarchies de contrôle familières de nos sociétés où la règle est imposée depuis le haut, dans le hiérarchies en nid (parfois appelées holonarchies), l’ordre a tendance à émerger depuis le bas; le système s’auto-génère à partir de la coopération adaptative spontanée entre les parts, dans un bénéfice mutuel. L’ordre et la différenciation vont de pair, les composants se diversifient au fur et à mesure qu’ils coordonnent leurs rôles et inventent de nouvelle réponses.

Joanna Macy

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